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Article blog Workcare - Chômeurs

Les chômeurs de Marienthal

Dès 1933, des sociologues se sont intéressés aux effets du chômage de masse et à ses conséquences humaines et psychologiques sur les personnes qui s’y trouvent confrontés. Un livre qui fait écho à une actualité récente.

L’actualité de ce livre (Les chômeurs de Marienthal) de 1933..

Voici un livre que nos sénateurs et parlementaires auraient peut-être dû lire avant qu’ils ne se penchent sur le projet de loi « pour le plein-emploi », et notamment sur la question de la mise en place d’un accompagnement plus personnalisé et directif des allocataires du RSA notamment en conditionnant le paiement de leurs allocations à la prestation d’heures de travail.

Cet ouvrage date de 1933 et pourtant il pourrait avoir été écrit en 2023 tant il permet d’appréhender la complexité que représentent le lien au travail et surtout les conséquences humaines et sociologiques de l’absence d’emploi et de perspectives.

Petit résumé : ce livre est le résultat d’une enquête dirigée par Paul Lazarsfeld, et menée en Autriche par les chercheurs Marie Jahoda et Hans Zeisel au début des années 1930. Une usine de textile ferma en 1930, et les auteurs observèrent les conséquences sociales de ce chômage de masse sur cette ville de 1500 habitants qui dépendaient dans leur immense majorité de cette usine.

La protection du chômage de 1930 est réduite au strict minimum et n’est donc pas très différente de celle octroyé par le RSA en 2023. Les habitants de la ville se retrouvent rapidement en mode survie sans possibilités matérielles de déménager ou chercher du travail plus loin.

Certes, les déplacements étaient plus compliqués en 1930 mais si on songe à une personne sans voiture et habitant en zone rurale ou périurbaine bénéficiant d’un logement social, la situation actuelle ne serait pas très différente.

Qui pousse à la réflexion

Ce livre est intéressant à deux titres : il décrit, chiffres à l’appui, la lente érosion des conditions de vie : les réserves s’épuisent, les habits s’usent, … La précarité s’installe mais il montre également la fatigue mentale et le repli sur soi des personnes touchées, replis qui transparaît au travers de la baisse de la fréquentation de la bibliothèque, des foyers de travailleurs, des associations.

Certains pourraient y voir la confirmation que la remise au travail même forcée est un bien et y trouver des arguments en faveur d’accompagnement directifs, ce serait, selon moi, une erreur parce que cela ne ferait qu’aggraver le phénomène de dépréciation.

À l’heure actuelle une personne au RSA passe un temps considérable en démarches administratives en tout genre : fournir des justificatifs, répondre à des convocations…, elle doit se justifier en permanence pour obtenir tout juste de quoi survivre. J’ignore si un tel décompte existe mais je pense que tout cela représente plusieurs heures par semaine !

Telle que présentée, la loi revient à dire que pour le peu qu’ils reçoivent, ils devraient en plus de ces démarches, prester quasi un mi-temps avec, à la clé, non pas la satisfaction de voir leur quotidien s’améliorer mais la crainte d’être sanctionné.

Est-ce vraiment la meilleure façon que ces personnes, souvent accidentées de la vie, puissent se sentir utile au bien commun, retrouver leur place au sein de la société et ne plus être regardées comme des « inutiles » qui devraient s’excuser d’avoir un jour perdu pied ?

Et donne envie de rêver.

Ces personnes doivent en effet être une priorité car, comme le décrit ce livre, personne n’aime se sentir inutile et encore moins considéré comme un profiteur. Le travail n’est pas seulement un moyen d’obtenir des ressources, il est surtout un ciment social et rempli le besoin vital qu’à toute personne d’être utile au bien commun.

Il serait temps d’abandonner le bâton et les contraintes administratives pour mettre en place un vrai accompagnement. Si toutes les personnes chargées actuellement de contrôler devenaient accompagnantes cela permettrait sans doute une avancée positive.

Utopique ? Pas si on instaurait un revenu universel … mais ça serait l’objet d’un autre article.

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